Los prismàticos de gavin

"Jorge Antonio Gavin était un pyrénéiste mythomane qui ouvrait des voies.. aux jumelles. Il réalisa, entre autres, la première ascension de la face sud du Tozal del Mallo (par la fisure Picazo, s'il vous plait!) en 1944, treize ans avant la véritable première ascension. Menteur, doux rêveur... "

Ça me fait toujours marrer ce genre d'histoires et c'est toujours drôle de découvrir l'existence de types aussi atypiques, farfelus illuminés!

En tout cas, cette voie là, a dû nécessiter de sacrées jumelles! Du dévers, des toits et encore du dévers! 

Chapeau bas aux ouvreurs pour avoir déniché un cheminement aussi logique dans cette paroi aussi raide, avoir réussi à y tracer une aussi belle ligne, tout ça avec humour! On aime!

Retour sur cette excellente journée qui nous confirme encore une fois qu'Ordesa... c'est dément!

Sans même avoir vu la paroi, le topo m'impressionne déjà!
...Ah ouais! ça grimpe cette histoire! 
ABO-, 7a+ max et 7a obligatoire... Et quasiment que des longueurs dans le 7ème degré... Oulala! Ça promet pétage de bras et serrage de fesses en perspective!

Qui c'est qui y va?? Un chifoumis qui tourne mal...

Ces stupides jeux de "chapeau chinois" et de "chifoumis" nous désignent, Charles et moi, cordée de tête pour la journée. Ce sera donc à nous de trouver le chemin...
Benoît et Rémi, encordés ensemble, nous suivront! 

J'ai aussi gagné le droit d'attaquer les premières longueurs en tête! 
Autant dire que je ne suis pas vraiment rassurée mais je sais que derrière il y a du renfort! (... et même si on me dit de me démerder, je sais bien qu'ils finiront bien par avoir pitié!)

Dans la première longueur...

Première longueur: 7a, 60m!  C'est très long, le caillou n'est pas toujours bon, il n'y a pas beaucoup de points en place mais c'est beau et ça roule plutôt bien. Je prends mon temps en essayant d'être à peu près concentrée!(pas facile quand j'entends toutes les bêtises que racontent les trois rigolos au pied de la voie!) ... Je grimpe et souris toute seule! 

Soixante mètres de corde plus tard, j'arrive au relais: contente!
Charles me rejoint tout aussi content et je repars pour la seconde longueur.

Charles dans L1

C'est parti pour L2!

Une nouvelle longueur 7a m'attend! Je démarre sur la pointe des pieds car avec tous ces blocs posés, j'ai super peur d'assommer Benoît et Rémi qui sont juste dessous... 
Heureusement, le caillou devient ensuite bien meilleur. Un premier toit à passer demande de forcer un peu, puis un réta qui me rappelle que je manque un peu de souplesse et enfin un dièdre lisse où il faut jouer des écarts me conduit au relais! Top!!

Dans le toit en 7a...

Charles arrive au relais

La suite??!? Toujours 7a! 
Cette fois, c'est Charles qui passe en tête. Une longueur de grande classe l'attend: gros dévers, bonnes prises! C'est entre autre pour des longueurs comme ça qu'on kiffe tant Ordesa! Magique!!

On rencontre pas mal de pitons en place et même s'ils ne sont pas tous bons, ça a au moins l’intérêt de nous montrer le chemin! 

Troisième longueur, top classe!

Gazzzz!

Je repasse devant pour la dernière longueur qui nous permet de rejoindre le jardin intermédiaire. Un joli dièdre, une traversée sur la gauche pour aller attraper une longue cheminée où il ne faut d'ailleurs pas tirer sur n'importe quoi!

Il ne nous reste plus qu'à traverser ce grand jardin suspendu pour rejoindre la seconde partie de la paroi. De quoi se dégourdir les jambes!
Nous voilà bientôt au pied du deuxième ressaut du Pilier du Cotatuero, trois longueurs et nous serons au sommet! ...Et quelles longueurs!

Ça repart de plus belle! Un 7a+ magnifique dans un mur orangé. C'est sacrément raide, il ne faut pas hésiter à aller à droite, à gauche... Aller d'un dièdre à l'autre... Bref! Ça grimpe vraiment! Charles s'en sort comme un chef!

7a+ pour Charles...

Rémi regarde la suite... euh...

Concernant la longueur qui suit, le topo dit: "7a, longueur sérieuse". 
On comprend vite qu'il s'agit d'une longueur au caillou sérieusement mauvais, aux protections sérieusement précaires et où la chute serait très sérieusement expo! 
Charles s'y attaque. Tranquillement mais sûrement il avance,... avance... avance jusqu'au relais! (pourtant pas facile à trouver ce petit crochet à droite!)
Oufffff! Bravo! Quelle machine!

Charles au charbon... longueur sérieuse...

Au relais, on est mort de trouille et on s'accroche tous les trois derrière notre nouvel idole! Maxi cordée! C'est ça la solidarité!
Merci Charles!

Les choses se calment, le caillou redevient extra et une dernière longueur de toute beauté dans du caillou gris bien compact clôture à merveille cette belle voie! 

Il ne ne reste plus qu'à attendre les copains qui ne devraient pas tarder...
Tout est calme... moments de contemplation... Le soleil couchant embellit encore davantage ces paysages incroyables qui ont pourtant déjà des airs de paradis!

Devant ce spectacle grandiose, je me dis que ce bon Russell avait vu juste...

"Le Canyon d'Ordesa est capable de donner aux anges la nostalgie de la terre".

Bientôt des éclats de voix nous sortent de notre rêverie... ils arrivent!! Nous voilà maintenant tous les quatre réunis, ultra contents d'avoir réalisé cette belle voie ensemble: 

Une de plus! Et celle ci... On ne l'aura pas faite aux jumelles!