vendredi 21 juin 2024

☆ Deux ans ☆...!Escal'A2roues#182






Hier était, pour nous, une journée un peu spéciale parce que ce même jour du mois de mai 2022, il y a tout pile deux ans, jour pour jour, nous remplissions nos sacoches et sautions sur nos vélos pour la toute première fois. Deux années dans une vie, c'est si court et si long à la fois. Des journées où les heures s'étirent du lever au coucher du soleil rythmées par l'imprévu et l'adaptation.Des journées où chaque seconde est vécue intensément de sorte que parfois, il nous semble que cela fait dix ans que notre vie est ainsi faite tant elle nous semble évidente, naturelle et "simple".Et en même temps, tout est passé si vite. Deux années qui telles un battement de cils, qui comme un rêve éveillé, ont défilé très vite, beaucoup trop vite. Pourquoi faudrait-il déjà songer à rentrer ? Et puis où rentrer quand on a rien à soi ? Est ce aussi chouette d'être nomade dans son propre pays ? On a encore tant à découvrir sur le monde, l'humanité et sur nous mêmes. Dans un mode de vie où l'on se recentre davantage sur l'essentiel, où manger, boire, avancer, se protéger des intempéries, faire en sorte de rester en vie et se reposer le temps d'une nuit deviennent nos principales occupations, où la sobriété est la clé, l'inconfort quasi permanent et le mouvement parfois fatiguant ; nos corps et nos humeurs sont parfois mis à rude épreuve. Tel deux compagnons de galère, on s'est aimé comme jamais, on a su percevoir des éclairs de joie, des étincelles de bonheur dans les yeux l'un de l'autre et parfois, fatigués, lassés et incompris, on s'est laissé agacer, on s'est quelques instants détesté sans pouvoir pour autant prendre véritablement le large.Puis, en se rappelant ce qui nous a conduit jusqu'ici, en prenant conscience que l'on entreprendrait un tel périple avec personne d'autre que l'un et l'autre, on a grandi. Comme au Scrabble de la vie commune, je me demande parfois si ces années ne compteraient pas double ou triple tant elles furent intenses.Que de chemin intérieur parcouru, que de kilomètres au compteur,que de rencontres fantastiques vécues et que de surprises improbables. Chaque jour est un voyage, une aventure en soi.Désormais, nous en connaissons davantage sur le monde et plus on le découvre et plus ce dernier apparaît vaste, riche et infini. Deux années, c'est 731 matins où l'on se réveille sans n'avoir aucune idée de ce qui composera sa journée. C'est découvrir et appréhender chaque jour encore davantage ce qu'on appelle désormais "le pouvoir du vélo".Cette chose magique et bien connue des cyclo-voyageurs qui fait que deux roues, un guidon, une selle et quelques bagages vous ouvrent les portes de la plus belle part de l'humanité. Ce simple objet métallique qui fait qu'une multitude de gens curieux et bienveillants, partout dans le monde viennent spontanément à votre rencontre et vous apportent leur aide et leur énergie alors même que vous n'aviez même pas vraiment conscience d'en manquer."Le pouvoir du vélo", c'est quand on vous offre spontanément un bout de pain alors que vous étiez affamés, qu'on vous fait découvrir de délicieuses spécialités locales à côté desquelles vous seriez certainement passés à côté, c'est lorsque deux mains vous tendent de quoi vous désaltérer quand vous mourriez de soif ou une boisson chaude alors que vous étiez presque congelés, ce sont des enfants qu'on envoie vous porter des fruits ou mettre en pratique les quelques mots d'anglais appris à la petite école du village. C'est une porte qu'on vous ouvre en grand, un lit moelleux ou un simple bout de jardin pour planter votre tente alors que vous aviez besoin d'un peu de repos, c'est une douche fraîche, un bain chaud qu'on vous fait couler ou un lave-linge qui tourne quand vous commenciez à sentir le fennec. C'est un véhicule qui s'arrête et vous embarque vous et vos vélos pour éviter que vous ne vous fassiez aplatir, c'est quelqu'un qui baisse la vitre et demande s'il peut vous aider à quelque chose, c'est un signe de la main ou un sourire qui vous encourage quand vous n'en pouviez plus. C'est aussi parfois des cadeaux et quelques pièces de monnaie pour améliorer votre quotidien, agrémenter de bonnes choses vos repas des jours suivants ou payer une réparation de votre vélo."Le pouvoir du vélo", c'est des gens aux parcours de vie différents qui font connaissance, ce sont des expériences partagées, du chouchoutage en règle et des leçons de gentillesse dont on voudrait se souvenir toujours. Hier soir, alors que nous partagions une énième fois des images du voyage sur une grande télé dans une petite salle pleine de sympathiques inconnus aux yeux curieux et aux exclamations enthousiastes, je percevais dans la pénombre, le visage de mon compagnon de vie et d'aventure. Ses yeux brillaient, il semblait ému aux larmes devant ce film vu, revu et rerevu plus d'une centaine de fois et dont il connaît chaque image, chaque paysage, chaque musique et chaque réplique !Deux ans plus tard, le pouvoir du vélo et la magie du voyage opéraient toujours.



samedi 15 juin 2024

Cerro Apidame, la perle rare de Patagonie....!Escal'A2roues#181






Parmi la variété de perles rares dont recèle la Patagonie, il y a cette drôle de formation rocheuse. Ce sommet aux parois orangées émergeant d'une pampa aux herbes jaune vif et aux contours contrastant dans un ciel bleu azur. Une massive forteresse de pierre visible à des kilomètres à la ronde, un vestige lointain d'un volcan endormi, une énorme cheminée magmatique figée et entourée d'un cône complètement érodé, une montagne d'orgues volcaniques aux airs de flan aux oeufs, gigantesque, fossilisé.



Une merveille de la nature, baptisée par les indiens du joli nom de la riviere voisine, "Cerro Apidame" puis rebaptisée "Cerro Colorado" par les colons à leur arrivée.Tout à la fois battu par les vents patagons et généreusement ensoleillé, cet étrange massif bénéficie, à n'en pas douter, d'un précieux micro-climat. Une chance inouïe quand on connaît les quantités de précipitations déversées quasi quotidiennement à quelques dizaines de kilomètres à peine.À mi chemin entre la pampa désertique argentine et les forêts luxuriantes de la Patagonie chilienne, le "Cerro Apidame" offre un peu de répit aux voyageurs ayant été un peu trop abondamment arrosés les jours précédents.




Une marche d'approche conséquente pour rejoindre la base de la montagne et des fissures raides et rectilignes à escalader proposent, quant à elles, un peu d'exercice aux badauds en manque d'effort.

Une multitude d'orgues alignés convergeant vers le ciel dans une perspective quasi parfaite offre aux grimpeurs une infinité de lignes de fuite qui ne demandent qu'à être gravies.






Si l'on considère que chaque orgue offre, de part et d'autre, deux potentiels dièdres à gravir et que chacun des dièdres est rayé ou non en son centre par une fissure de taille variée, alors, on peut affirmer, sans craindre de trop se tromper, que les possibilités de lignes à ouvrir semblent infinies sur le Cerro Colorado.


Doit-on aussi préciser que pour ajouter un peu de piment à l'histoire, ici, plus on prend de la hauteur, plus la paroi se redresse radicalement. Enfin si l'on choisit de pousuivre la balade jusqu'au véritable sommet en couronnant l'escalade par une course d'arête sur orgues en décomposition et en équilibre précaire, alors, l'aventure commence à devenir totale et inoubliable.





dimanche 9 juin 2024

mardi 4 juin 2024

Un passage de frontière pas comme les autres.....!Escal'A2roues#179



Imaginez qu'après quelques semaines de fuite vers le sud, la route de terre s'arrête soudainement sur les berges d'un grand lac et que des montagnes incroyables et chères à votre coeur se trouvent à quelques dizaines de kilomètres à vol de condors à peine. Qu'auriez-vous envie de faire ? Certainement pas demi-tour si près du bout du monde !

La première mission consiste donc à trouver, en cette toute fin de saison, un petit bateau pour traverser ce grand lac et poursuivre cette échappée vers des terres toujours plus australes...

Imaginez ensuite que de l'autre côté, quelques militaires attendent, en se tournant les pouces, qu'un ou deux voyageurs à pieds ou à vélo débarquent un jour ,pour leur tamponner leurs passeports et'officialiser leur sortie du territoire.

La suite, c'est 15 kilomètres d'une mauvaise piste qui grimpe, suivie d'un sentier de 5 kilomètres. Cette alternance de marécages, bartassage, accrobranche et passages de ruisseaux nous valent d'établir un nouveau record de lenteur, et pas des moindres : 1km/h !!!

Un nouveau poste frontière et des douaniers qui apprennent une fois encore la patience, un tampon supplémentaire, un nouveau lac et un second bateau à dénicher : Buenos dias Argentina ! Nous revoilà !

Il ne reste plus qu'à trouver une embarcation pour traverser cette grande étendue d'eau alors que la saison est définitivement close. Un bateau de l'armée et quelques dizaines de militaires en guise de matelots, comme quoi... il ne faut jamais dire jamais ! On s'évite ainsi une nouvelle nuit frisquette et on fait une croisière à moindre frais avec vue sur le Fitz Roy !

La suite, c'est une entrée triomphale à El Chalten où presque tout est fermé et où les touristes ont déserté mais où, heureusement, quelques amis sont toujours là et les montagnes n'ont pas changé !

Une frontière définitivement pas comme les autres que l'on n'est pas prêt d'oublier






samedi 1 juin 2024

Un automne en Patagonie.......!Escal'A2roues#178



De la pampa à perte de vue, vastes étendues planes quasi désertiques, herbe rase, jaune, sèche, vent qui souffle, poussière qui vole...


Soleil rasant, belle lumière, été indien...


Et puis un jour, tout est devenu plus luxuriant, des forêts primaires ont fait leur apparition sur les flancs des collines puis ces collines se sont transformées en montagnes, les rivières étaient puissantes et de l'eau s'est mise à tomber du ciel: une pluie fine mais soutenue. Doucement mais sûrement, nos vêtements s'humidifiaient...



Le vent s'est mis à souffler comme un fou, déséquilibrant les funambules à deux roues que nous sommes. Les immenses lacs se couvrirent alors de crêtes blanches, vagues qui laissaient penser que nous avions rejoint la côte et l'océan.


Dans ces conditions, les distances s'allongèrent considérablement. Les mètres de dénivelé s'accumulaient, les endroits peuplés par l'homme se sont peu à peu radicalement espacés.

Les arbres torturés par le vent se sont tous mis à pencher dans la même direction et ont pris, tous ou presque, des airs de bonzaïs géants. Les prairies se sont transformées en étendues marécageuses et les arcs en ciel ont ponctué notre route rendant le ciel gris moins triste.



Quelques rayons de soleil réussirent même parfois à se faufiler au travers de l'épaisse couche de nuages, ajoutant une lumière nouvelle au tableau.

La Patagonie excelle en la matière quand il s'agit de jouer un rôle dramatique.


Un jour, on entendit le son d'un pic qui martelait de son bec un tronc, on aperçut ensuite son plumage rouge et noir et sa silhouette élégante de "carpintero".



Les feuilles des arbres rétrécirent, les épines des buissons devinrent agressives et quelques baies de "calafate" retardataires ajoutaient quelques touches de violet. Du lychen pendait des branches tel de longues moustaches et une espèce de mousse rendait le sol aussi spongieux que moelleux.



Et puis l'asphalte se laissa envahir ça et là par du lychen. Cette dernière laissa ensuite place au "ripio" agrémenté de quelques beaux nids de poule ou de tôle légèrement ondulée. Le vent leva de la poussière et nous accompagna en nous soufflant dans le dos.

Entre averses et coups de vent, kilomètre après kilomètre, coup de pédale après coup de pédale, la Patagonie s'offrait à nous.



Et puis, au fil des jours, la pluie est devenue plus froide, les nuits nous sont apparues de plus en plus fraîches, la rosée du matin se transforma en gelée nocturne et l'eau dans nos gourdes devint un bloc de glace.

On ajouta encore des couches à nos tenues vestimentaires que l'on garda nuit et jour.



Les sommets alentours blanchirent à vue d'œil, quelques flocons de neige arrivèrent même, quelquesfois jusqu'à nous. Les jours devinrent plus courts, la nuit tomba plus vite, on se mit à dormir davantage. Les fleurs de lupins colorées étaient sur le point de faner, les fruits de cynorhodon étaient à leur apogée.



En un battement de cil et en quelques kilomètres à peine, les arbres virèrent du vert au jaune, de l'orangé au rouge vif.

L'automne patagon était là.

Toutes les conditions furent alors réunies pour que le paysage, l'ambiance et l'aventure s'embellissent encore davantage.




La route s'arrêta, stoppée net sur les rives d'un immense lac, les vélos furent amarrés sur le pont d'un bateau, de longues heures bercés par les flots. Sur l'autre rive, un chemin se transformant ensuite en sentier facilita notre ruée vers le sud.



Et puis un jour, au loin, bouquet final de ce vagabondage patagon, dans un ciel sans nuage, des montagnes rocheuses apparurent. Sommets du bout du monde, tours de roches coiffées de gîvre, aiguilles de granit semblant flotter au dessus d'une forêt en feu.



Nos sourires radieux et nos yeux brillants en disaient long...

Nous étions arrivés à destination.




mercredi 29 mai 2024

Nos cabanes en Patagonie........!Escal'A2roues#177






Tente légère et vent patagon ne font pas bon ménage, vélo sous la pluie et séchage sous la tente non plus...

Aussi il aura fallu être imaginatifs et avoir un peu de flair pour chaque soir se trouver un abri. On peut dire que vu l'isolement du lieu et la faible quantité de construction, on s'en est pas trop mal sortis !

Du kiosque de marché à la maison en construction, de la cabane abandonnée aux gradins de stade, de l'étable à l'hôtel restaurant déserté, de l'arrêt de bus à la maison en ruine... et j'en oublie !

Changer de maison chaque soir, ça c'est la classe !