mercredi 5 novembre 2014

Expé Pamir : Tout est bien qui finit bien ! ( Episode 3 )

Après notre aventure à la Tour Russe, quelques jours de repos s’imposent. Manger et dormir : voilà le programme !


En notre absence, Titi et Sylvain ont ouvert une voie à la Tour Rouge, une très belle ligne sur du super caillou. Ils choisiront de la nommer « Sourire Kirghize », ED+, 650m.


A l'ouverture de "Sourire Kirghize"

Les autres ont, quant à eux, repéré une ligne dans la face Nord du Pic Pyramidal. Enfin, il serait plus exact de dire qu’ils ont imaginé un itinéraire, puisqu’en regardant leurs photos, nous avons vraiment du mal à déceler quelque chose d’évident qui mènerait au sommet!
Le Pic Pyramidal, haut de 5500m est situé au bout de la vallée dans laquelle nous nous trouvons, il offre une grosse face d’environ 1200m bien impressionnante !
Quand nous rentrons de «Perestroicrack», une équipe composée de Tiphaine, Robin, Tough et Christophe est déjà partie en direction de la face alors que Pat, Titi et Ingrid sont sur le point de quitter le camp de base dès le lendemain.


Le Pic Pyramidal
Les jours suivants nous assureront la liaison radio entre les deux cordées qui sont dans la face et le camp de base. Entre deux siestes, repas, films et lecture nous essayons de soutenir autant que possible nos copains engagés dans cette grande face. Nous tentons de leurs transmettre les quelques «infos météo» dont nous disposons via le téléphone satellite, d’autant plus que le temps s’est vraiment dégradé ces jours-ci. En réalité, notre job consiste plus à les rassurer et à leur montrer qu’ici en bas, on pense bien à eux qu’à vraiment leur filer un coup de main avec des prévisions météo très très aléatoires!
Entendre leurs voix nous fait du bien et je crois bien que c’est réciproque!

La première équipe parviendra à rejoindre l’arête sommitale après deux journées et un bivouac dans la face. Le deuxième jour, le mauvais temps est là et ils resteront bloqués «à l’abri» d’une crevasse une journée entière. Le lendemain, le risque d’avalanche et le manque de nourriture et de gaz les obligeront à renoncer au sommet et à redescendre par l’arête très enneigée où les pentes surchargées de neige ne demandent qu’à descendre. Grosse mission! 
Un grand bravo à eux!

La seconde équipe, partie un jour plus tard devra quant à elle capituler au matin du deuxième jour après avoir passé une bien mauvaise nuit au premier tiers de la face. Ils rejoindront le pied de la face en rappel puis le camp de base le soir même…





Avec Julien, nous sommes bien motivés pour tenter le sommet du Pic Pyramidal par l’arête, la face nous faisant quand même un peu peur et nos jours étant comptés… et oui, ça sent déjà la fin!
Remonter cette arête jusqu’au sommet aurait pu être génial. Même si nous n’avons pas vraiment d’infos sur ce qui pouvait nous attendre, l’idée de rencontrer nos compagnons redescendant par cette même arête après avoir vaincu le sommet, serait un moment magique!
Robin, Tough, Tiphaine et Christophe se trouvant déjà sur la partie supérieure de l’arête, nous attendons des infos de leur part. 
Nos sacs sont prêts et nous attendons le top départ! Départ que nous remettons au lendemain. En effet, les nouvelles ne sont pas vraiment bonnes. Il y a vraiment énormément de neige et le vent a soufflé très fort ces derniers jours ; venir se balader sur cette arête sans y être vraiment obligés ne serait pas une très bonne idée! D’autant plus que nos copains ne sont pas sortis d’affaire puisque eux, par contre, sont obligatoirement contraints d’emprunter ce même itinéraire pour rejoindre la vallée.
Le jour où nous devons quitter le camp de base pour le trek de retour approche tandis que l’espoir de tenter le Pyramidal s’éloigne de plus en plus. Tant pis! Ce ne sera pas pour cette fois et ce n’est peut être pas plus mal comme ça!

Les copains vont rendre visite à « Sourire Kirghize » alors qu’avec Juju, nous décidons d’aller explorer la petite Tour de l’Assan, cela nous permettra de découvrir un nouveau coin, de voir de plus près le géant Assan mais aussi d’affuter notre œil de « présumés ouvreurs ». Lors de nos passages au pied de cette face, nous cherchons à repérer une ligne de faiblesse, un itinéraire qui nous permettrait de rejoindre le sommet, tout en étant logique et élégant.
Bien vu! Très rapidement nous rencontrons du matériel laissé par des cordées précédentes. D’autres, avant nous, ont eu la même idée et la même intuition: remonter ce pilier et suivre ces fissures là!


Le grand Assan et sa petite tour...

L’escalade est plutôt jolie et les difficultés ne dépassent pas le 6b. On se fait vraiment plaisir même si on se caille un peu! Après une dizaine de longueurs nous débouchons sur une arête ensoleillée, ce petit parcours aérien est bien agréable. Le sommet n’est pas tout proche mais peu à peu nous nous en rapprochons. Pour la descente, il va falloir, là encore, improviser. Le versant Nord nous parait être une bonne option, mais pour ce coup ci, visiblement, les cordées précédentes n’ont pas eu la même idée. Nous équipons donc une toute nouvelle ligne de rappels.




Vers le sommet de la petite tour de l'Assan
Retour au camp de base juste avant la nuit. Notre chienne Kirghize aboie pour annoncer notre arrivée. Les tentes sont déjà éclairées, éclats de voix et rires s’en envolent : L’équipe du Pyramidal est de retour! Nous sommes les deux derniers à rentrer ce soir, nous voici tous réunis, enfin! Cela faisait plus de 15 jours que nous n’avions pas partagé un repas et une soirée ensemble! Quel bonheur de tous se retrouver!
Les visages sont marqués mais la joie est bien là… Moments magiques où le bonheur de leur réussite envahit l’équipe au complet. Nous écoutons avec passion leurs récits, nos yeux brillent!

Cette soirée sera une belle conclusion à ces quelques semaines passées au camp de base.



Après tout cela, le reste ne sera qu’épilogue, rangement du camp de base, trois jours de trek sous un temps parfois maussade et sans grand chose à manger, des heures de marche, les mules, la séparation avec notre jolie chienne à laquelle nous avions fini par nous attacher, les adieux à Elena et à Max, bus, avion…

Notre copine la chienne!













Avec Max le freerider... Pyrénées Libres!



Retour à Ouzgurush puis à Batken et enfin retour à la capitale : Bichkek. Le restau Coréen où la distribution des plats ressemble à un tirage de loterie... Les bières, la vodka... 




La suite, vous la connaissait déjà… Il est maintenant 5h du matin, nous sommes toujours là dans ce commissariat suite à une altercation à la sortie d’une pauvre boîte de nuit. La situation s’est quand même peu à peu détendue. La moitié du groupe est déjà dehors, à discuter sur le trottoir avec des flics qui visiblement se sont lassés de jouer les cowboys! Nous sommes encore «prisonniers» mais nous ne tardons pas à retrouver la liberté. Ouf!

Nous voici tous les sept sains et saufs ou presque… L’épaule de Tiphaine est encore douloureuse et Juju a la cheville bien enflée… Il ne nous reste plus qu’à retrouver notre pote Robin qui s’est volatilisé dans la bagarre. Nous sommes vraiment inquiets pour lui, et nous ne savons pas vraiment où le chercher. Nous sautons dans un taxi et lui donnons l’adresse de l’agence, nous traversons Bichkek, les rues sont désertes.
Bientôt nous reconnaissons des lieux connus, quelques minutes plus tard nous arrivons devant le grand portail vert qui ferme le jardin de l’agence.
Un point lumineux, une cigarette allumée. Une silhouette apparait ensuite. On n’ose pas y croire. On attend de se rapprocher encore pour être sûr, pour être bien sûr. Les cris de joies explosent dans le taxi, c’est lui, c’est Robin! Il a réussi à se sauver pendant l’arrestation…
Deux secondes plus tard, nous nous serrons tous dans les bras, on s’embrasse, quelques larmes doivent bien couler aussi. On est si heureux de se retrouver, on est sauvés!
Le stress retombe, la pression explose...

Cette fois ci, pas de face nord, pas d’arête, pas de bivouac merdique, pas de risque d’avalanche et pourtant… A cet instant précis, le mot « équipe » prend tout son sens et résonne en chacun d’entre nous.

 Sacrée expérience que l’on n’est pas prêt d’oublier…