mercredi 28 juin 2023

Quelques petites voies et puis s'en va ! #11Escal'A2roues#102






Aurait-on imaginé que l'on grimperait autant au Japon ?

On ne peut pas dire que les falaises nippones fassent souvent la une des magazines internationaux de grimpe et pourtant le pays compte bon nombre de jolis secteurs, une quantité infinie de très très forts grimpeurs et même certains des alpinistes les plus fameux. Ici, il y a une réelle culture montagne et l'escalade à une place de choix dans le cœur de nombreux japonais.

En deux mois et demi passés au pays du soleil levant nous aurons eu l'occasion de grimper sur 7 spots différents et de rencontrer des grimpeurs ultra sympas.






Chaque secteur fréquenté aura été une belle découverte. Chacun nous aura marqué par son caractère, qu'il s'agisse du style de grimpe, de l'équipement parcimonieux ou de son rocher caractéristique.

Du basalte noir, du granit doré, des fissures taillées au couteau, des dalles lisses comme des tableaux d'école, quelques spits par ci par là et parfois toute une ribambelle de cams accrochés à la ceinture. Il y en aura eu pour tous les goûts !

Nous aurons même fait une pause sur deux petits spots calcaires du style "vieille école" comme pour nous rappeler que l'on est définitivement mieux là qu'à s'acharner pour essayer de grimper sur les rebords de fossés Haut Savoyards !


On ne pourra pas dire que ce sont ces journées- là de grimpe qui nous auront les plus séduits mais c'est durant l'une d'elle que l'on aura eu la chance de rencontrer Kenji.

Une fois encore le hasard fait bien les choses et il se trouve que ce sympathique grimpeur habite dans la région d'Hiroshima, une de nos futures étapes. Quelques secondes avant qu'il ne quitte la falaise, nous convenons donc de lui laisser tout notre matériel de grimpe afin de nous alléger pour les quelques centaines de kilomètres que nous avons à parcourir les prochains jours. 17 kg en moins sur nos porte-bagages et l'on se sent pousser des ailes durant quelques jours !


Lorsque nous retrouvons Kenji chez lui, nous découvrons avec surprise que plusieurs de ses amis et quelques voisins ont été invités pour un barbeuc improvisé afin de partager un chouette moment et de rencontrer deux illuminés qui se baladent depuis un an à vélo.





Une fois encore nous sommes ébahis devant tant de gentillesse et de bienveillance. Nous plongeons tout d'abord dans un bain chaud puis nous mangeons comme quatre, nous recevons même des cadeaux et la soirée se conclut en visionnant, tous ensemble, sur une grande télé, une vidéo made in "Escal'À 2roues". On s'écroule ensuite sur les confortables matelas du pan d'escalade de Kenji !



Après une journée de grimpe partagée , nous reprenons la route en direction de notre dernière escale minérale : Mikuradake


Mi : trois

Kura : montagne

Date : monsieur

Voilà à quoi ressemble Mikura : Trois sommets rocheux entourés d'une dense forêt. Des petits secteurs dispersés un peu partout, des sentiers par ci par là, des indications illisibles sur des panneaux et un topo exclusivement en japonais !

Sans l'aide précieuse de Kenji, notre séjour à Mikura aurait certainement ressemblé à celui de deux randonneurs perdus dans la forêt !




Mais une fois encore, l'organisation des vacances au Japon est au top du top !

Nous posons notre tente dans l'aire de camping gratuite, au pied de la montagne et chaque jour, à 9h, un ou plusieurs grimpeurs contacté par Kenji débarquent et nous guident de rocher en rocher.

Ainsi durant 5 journées, accompagnés de Matchan et parfois de Jin nous grimperont les plus belles fissures et les plus jolies dalles.


 
Notez la tenue atypique de Jin...

Pour être plus exacte, je devrais plutôt dire : nous grimperons les plus larges fissures et les dalles les plus lisses !

Allez savoir pourquoi, ici la nature en a décidé ainsi...


Au menu, c'est :

Moments de doute au-dessus du dernier point d'assurance au milieu d'une dalle sans aucune trace de prise et où au moindre faux pas, tous ces cristaux de granit attendent de vous labourer le menton !

OU

Bataille acharnée où tous les coups sont permis et tous les noms d'oiseaux aussi dans des fissures version XXXL ! Bleus et égratignures en guise de cadeaux souvenirs.

C'est fou comme un paradis de la grimpe peut ainsi se transformer en enfer !!



Ajoutez à cela certaines journées où, sans explication rationnelle, des milliards de millions de minuscules mouches s'invitent à la fête, c'est le pompon !











Donc en résumé : tu forces, tu grognes, tu râpes, tu coinces, tu glisses, tu bourrines, tu souffres, tu couines, tu transpires et tu rampes, tout ça pour gagner un demi centimètre de hauteur ! L'important étant de garder la bouche fermée pour ne pas en plus ajouter un énième désagrément :: celui d'avaler une mouche de travers !






Le rocher est sublime, l'équipement minimaliste et le paysage est magnifique ! Les falaises ne sont parfois pas bien hautes mais tous ceux qui ont déjà bataillé dans des fissures extra-larges comprendront que quelques mètres suffisent déjà à se mettre la mission !



Le week-end venu, c'est toute une foule de grimpeurs et de randonneurs qui débarque. Les tentes poussent alors dans le camping comme des champignons. Le soir venu de grands feus crépitent un peu partout dans la forêt et on entend les capsules de bouteilles de bières sauter autant que les rires fuser !


Nous nous sommes donc adaptés à cette culture locale et avons partagé une chouette soirée, un bon repas, quelques verres ainsi que deux journées de grimpe avec une sympathique petite bande.

Ces jours-là, les chemins sont encombrés et le trafic est dense sur le rocher. Nous sommes venus ajouter deux grimpeurs supplémentaires à ce flux de varappeurs !

Une arête composée d'une succession de blocs posés en équilibre plus ou moins précaire nous conduira sur l'un des trois sommets de Mikura. Chaque longueur est comme un problème de bloc à résoudre. C'est court, pas facile et le risque en cas de chute est de s'aplatir sur une vire !





Au sommet, on découvre des dômes granitiques tout arrondis et des pins tout torturés ayant des airs de bonsaïs géants. C'est aussi sympa de sortir un peu la tête de la forêt et d'apercevoir la mer au loin...




 
Le sandwich sushi, la récompense au sommet !

Cette multipitch en sympathique compagnie clôturera à merveille ici cette session grimpe et surtout cette escale au Japon.


À présent, il ne reste plus qu'à dégringoler de la colline, longer la côte Sud et rouler vers l'Ouest du Japon pour rejoindre un port, sauter dans un ferry et voguer vers la prochaine destination !

Une idée ?




lundi 26 juin 2023

Hiroshima Japon#10 Escal'A2roues#101







"HIROSHIMA, PLUS JAMAIS ÇA !"

Aussi loin que je me souvienne, je crois avoir toujours vu à l'arrière des voitures de mes parents cet autocollant jaune, ce soleil orangé souriant et ce slogan : "Nucléaire, non merci !"


Enfant, Hiroshima était pour moi, synonyme de ces enveloppes imprimées par le "réseau sortir du nucléaire" dans lequel on glissait le courrier familial. En 1995, à peine arrivé au pouvoir, Chirac faisait le choix de reprendre les essais nucléaires. Quel beau cadeau au monde pour fêter le cinquantième et triste anniversaire des bombardements américains sur le Japon. Plus tard, j'en apprenais davantage au sujet des causes, des conséquences et du niveau d'atrocité dans ce que les livres d'histoire voulaient bien nous montrer.


Aujourd'hui, me voilà à Hiroshima.

Aujourd'hui, me voici au mémorial de la paix situé à l'emplacement exact de l'hypocentre de l'explosion de la bombe atomique. Maintenant, je sais que ce qui s'est passé le 6 août 1945 à 8h15 et les minutes, les heures, les jours, les mois et les années suivantes dépasse tout ce que l'on pourrait imaginer.

Une violence inouie suivie d'une très longue agonie.




Maintenant, je sais aussi qu'Hiroshima et la bombe A, ce fut : 12km² de ville anéantis, des incendies monstrueux, une onde de choc et des vents entre 300 et 800 km/h, des températures au sol frôlant les 4000 °C, des pluies noires chargées de particules radioactives. Des dizaines de milliers d'enfants, de femmes et d'hommes morts sur le coup, des gens complètement carbonisés et des personnes hautement irradiées qui ont agonisé durant des mois ou de nombreuses années. On estime qu'environ 140 000 habitants d'Hiroshima auraient perdu la vie entre le moment de l'explosion, le 6 août 1945 et la fin du mois de décembre 1945. À cela s'ajoute tous les cancers et maladies causés par les radiations et des années de souffrances.


Je sais aussi qu'il y a eu des tentatives de signatures de pactes pour officialiser

la non-utilisation de la bombe nucléaire.

Je sais aussi que bon nombre de pays n'en ont pas été signataires et que les essais nucléaires se poursuivent, tuant des gens de maladie, obligeant d'autres à quitter leur lieu de vie et sont responsables de désastres écologiques et environnementaux.

Maintenant, je sais.

Maintenant, vous savez.

Aujourd'hui, nous le savons tous !

"HIROSHIMA, PLUS JAMAIS ÇA !"




Les îles de l'île Japon#9Escal'A2roues#100







Vous connaissez l'histoire de la vache qui rit et du dessin dans la boucle d'oreille qui se perpétue à l'infini ?

Ben là, c'est un peu pareil !

Le Japon, une grande île qui forme un pays. Shikoku est l'île de cette île qui forme une région. Shimanami est un archipel d'îles menant à l'île de l'île. Vous suivez ?


Cinq ou six ponts de plusieurs kilomètres qui relient tout ça et nous voici partis pour une infernale série de "saute île" dans un véritable paradis pour cyclistes !

Shimanami Kaido, ce sont 75 kilomètres d'itinéraires aménagés pour les cyclos afin de se balader d'îlot en îlot.


 
Les très fameuses grues du Japon

Le jeu consiste à pédaler le long de côtes, à grimper sur des ponts immenses et à en redescendre via des systèmes de rampes en spirale à l'inclinaison parfaite, digne des meilleurs parkings sous-terrain dans lesquels l'on ne met jamais nos roues.



Durant deux jours nos yeux sont rivés sur les vagues, nos bivouacs sont marins et notre maison a presque les pieds dans l'eau. Nous pédalons cheveux au vent et quelque- fois vent dans le nez. L'odeur des orangers en fleurs embaume nos narines.



Parfois quelques gouttes de pluie rincent notre visage salé et le soleil rougit nos épaules. Sur ce chemin parfait, sur cet asphalte lisse, une seule main suffit à tenir le guidon, l'autre étant sans cesse en l'air pour saluer tous les cyclistes rencontrés.

Moi j'ai super kiffé sa casquette !!

Ici, nous croiserons un paquet de touristes improvisés cyclistes, des sportifs à deux roues mais aussi nos tout premiers et quasi seuls cyclo-voyageurs depuis presque deux mois.

Un couple de français qui ont trouvé une belle occupation pour embellir leur retraite !


Notre itinéraire n'avait pas vraiment de raison de nous conduire ici mais la curiosité nous y a poussés. Aussi, nous avons dû rebrousser chemin une fois arrivés à destination. La plupart des cyclistes louent des vélos, font le trajet en mode aller simple et effectuent le retour en bateau ou en bus. Mais quand on aime, on ne compte pas (sauf les sous !).


Le bateau étant trop cher, nous avons eu l'obligation de parcourir cet itinéraire dans un sens puis dans l'autre. Double chance d’emprunter cette jolie route tantôt sur terre, tantôt suspendue au-dessus de l'eau !



Une parenthèse relaxante de 150 km avant de repartir à la rencontre des collines et des falaises !