dimanche 24 juillet 2022

Transkazakhien, terminus Ouzbékistan •Escal'A2roues#28•

Environ 41 h et 2229 km parcourus sur les rails à travers le Kazakhstan pour rejoindre l'Ouzbékistan... (...pour ceux qui auraient lâché l'affaire du casse-tête Kazaque de l'articleprécédent!) 


5 jours de voyage en train, ça peut paraître un peu long et ennuyeux mais détrompez-vous, en chemin, on vit des choses très chouettes ! 


On a tout d'abord tout son temps pour apprécier le paysage. A la fenêtre, c'est toujours le même : désert à perte de vue. C'est à croire qu'on aime les choses monotones. Tout comme la forêt de Sibérie enneigée ce n'est pas très varié : du sable et un peu d'herbe sèche, parfois un lac de sel asséché et de temps en temps quelques chameaux qui bronzent... 


On a aussi le loisir de bouquiner à volonté. Une liseuse pour deux, parfois l'un doit faire la lecture à l'autre.
Guy de St Cyr et ses histoires à coucher dehors nous tiennent en haleine. Un vulcanologue se baladant entre des coulées de lave rouge,inhalant toutes sortes de gaz toxiques, jouant entre les projectiles brûlant, il n'en faut pas moins pour réchauffer l'atmosphère quand il ne fait de 48 degrés dehors ! 


Dans le train, on fait aussi de belles rencontres. 
Un "wagon lits" en 3ème classe, ça veut dire être à soixante personnes dans la même chambre à coucher et à soixante personnes dans la même salle à manger ou le même salon ! C'est convivial !


C'est un peu comme la promiscuité d'un refuge mais là tu y restes nuit et jour.
Le prodovnic tente de faire régner l'ordre et se contorsionne dans tous les sens pour passer le coup de balai quotidien entre les bagages et les pieds de chacun. Quel job ! 

Le "samovar" tourne à plein régime fournissant de l'eau bouillante à tous les voyageurs. L'odeur de soupe chinoise lyophilisée embaume tout le wagon. 


Bonbons, beignets, melon, épis de maïs, thé, bouteille d'eau fraîche, lait de chamelle... Miam ! 

On reçoit des cadeaux gustatifs et nos estomacs sont plutôt ravis ! On est encore pas très au point sur les ravitos... 

"Rarkmed" à tous et une fois encore Google Trad pour les échanges ! 


On dort aussi, bien calés dans les couchettes. Comme tous les trajets sont longs, tous les trains ou presque proposent des couchettes et non des sièges.


Lorsqu'on embarque dans un train sans billet, ça se passe comme ça :
 

Et la nuit c'est dans le rak à bagages que ça se passe ! C'est pas bien large mais quand on est pas épais, ça peut fonctionner ! Du coup j'ai laissé ma place ! 


On fait des petits dessins même si parfois ça bouge beaucoup trop ! Le "Tremblotant style", ça a son charme non ? 



On écoute des podcasts sur tout plein de sujets divers et variés. Entre autres l'histoire de deux cyclovoyageurs qui sont partis d'Alaska pour rejoindre la Patagonie en plus de 2 ans et demi. On partage ! 



A chaque escale, on découvre des choses incroyables : 

* Une mer avec davantage de serpents qui nagent que de baigneurs. La mer Caspienne nous rafraichira à peine ! 


* En pleine nuit, une station service d'autoroute peut faire office de formidable terrain de camping. 


* Se lier d'amitié avec un chameau, c'est cadeau ! Ainsi, ce dernier nous expliquera pourquoi certains de ses copains n'ont qu'une seule bosse sur leur dos.
Croisements effectués entre chameaux et dromadaires pour avoir un rapport optimal pelage (pour les basses températures hivernales et pour le lainage) et production de lait. 


* Qu'au milieu du désert, l'eau peut couler à flot et qu'on peut y jouer comme des enfants ! 



* Improvisation musicale dans un jardin public.


* Contemplation d'un bien triste spectacle : une mer quasiment entièrement asséchée par le détournement successif de deux grands fleuves, utilisés aujourd'hui pour l'irrigation des cultures intensives de coton.




Plus d'eau pour les poissons de la mer d'Aral, plus de poissons pour les pêcheurs de la mer d'Aral, plus de pêcheurs pour les bateaux de la mer d'Aral...
Cimetière marin. 



* Devenir les invités d'un jour ! Petit dej' et visite guidée à Aralsk... What else ?


* Découvrir comment se faire refouler d'un train peut se transformer en une histoire de fou ! (Article précédent) 

* Déguster des Samsa, chaussons, cuits collés aux paroi de fours en terre sèche.



 Quel labeur pour leur fabrication, le nez dans le four alors qu'il fait si chaud dehors. Les décoller des parois brûlantes sans les faire tomber est tout un art pour lequel il faut manier baguette en métal et épuisette avec brio ! 


* Rencontrer en Ouzbékistan nos toutes premières pistes cyclables depuis le début du voyage. Comme quoi ! 
Bon... Pour les jonctions à chaque intersection mieux vaut savoir lever la roue avant ! 


* Déambuler dans le bazar local...










* Rester scotchés devant des monuments grandioses et éblouissants de par leurs couleurs, leurs architectures et leurs histoires. Turkestan, la petite sœur et Samarcande la magnifique ! 










Ce soir là, on aurait pu rester des heures à admirer ce mausolée à la lumière des projecteurs.

Quel spectacle ! 


Il est temps à présent de se remettre en selle et de prendre un peu de hauteur. 

Après touts ces jours dans la civilisation, aussi riches soient ils, je crois qu'on a tous les deux comme une envie qui se précise de fuir la chaleur, retrouver des contrées un peu plus sauvages, revoir des montagnes et bivouaquer où bon nous semble. 


La route continue toujours plus à l'Est... Une fois encore la prochaine destination se termine en "stan", alors ? 

Le pedalistan a encore de belles choses à nous offrir !



Parfois on perd, parfois on gagne... •Escal'A2roues#27•

 Chimkent, 5h00 du matin.

Nous venons de traverser la ville encore endormie à la lueur de nos frontales. Lorsque nous arrivons sur le quai de la gare, nous même à moitié réveillés, il fait encore bien sombre. Quelques personnes terminent leur nuit, allongées sur un banc, d’autres attendent patiemment leur train qui n'est pourtant prévu que dans deux heures. Les kazaques sont toujours en avance lorsqu'il s’agit de sauter dans un train ! 
On échange les banalités classiques. «D'où venez vous ? Aimez vous le foot ? Êtes vous mariés ? Quel âge avez-vous ?» 

Alors qu’on a presque fait le tour des présentations, notre train ne tarde pas faire retentir son sifflement et à pointer son nez. 

Nous sommes à présent rodés, c’est le sixième train dans lequel nous allons grimper au Kazakhstan en l’espace de 5 jours. Celui-ci nous mènera à Tashkent en Ouzbékistan. Les sacoches sont toutes retirées, la cordelette qui nous sert à ligoter les vélos à la verticale entre deux wagons est délovée, notre téléphone prêt à dégainer nos billets électroniques. 
Le temps d’arrêt peut varier de quelques minutes à plus d’une heure mais là encore, nous n’avons pas tout saisi, alors il vaut mieux ne pas trop traîner.

Le train stoppe sa course et la prodovnik de notre futur wagon saute sur le quai. Elle a à peine le temps de nous apercevoir qu'elle déclare que pour nous, c’est d’accord mais que pour les «velocipèdes», c’est «nieto» ! 

Elle nous invite donc à monter dans le train en laissant les vélos sur le quai. À notre tour de lui dire que : «désolé mais là, c'est  «niet » ! 

Zut, nous aussi, on peut le faire… Un partout, balle au centre ! 

S'en suit une partie enflammée de «ni oui ni non» mais avec toutefois beaucoup plus de «non». 
On sort alors le grand jeu : notre bon ami polyglotte, «Google Trad». Ce dernier tente alors d'expliquer à l'employée de la société de chemin de fer que nous avons déjà parcouru plus de 2000km en train à travers le Kazakhstan accompagnés de nos vélos sans soucis, celui-ci sera le dernier. 
La riposte ne tarde pas à arriver et l’interprète en ligne nous informe que ce train étant plus rapide et plus étroit que les autres, la règle est différente. Dans le Talgo, pas de vélo. 
Si on change les règles en cours de partie aussi… 

On sort alors notre plus bel atout : LA photo de nos deux bicyclettes bien rangées dans le train précédant. «Vous voyez, ça fonctionne !» 

Le joker "illustration" ne fait aucun effet sur notre adversaire et les "nietos" s’intensifient encore. On tente le chantage version Monopoly : «Mais quand même, on a payé !!!» 

Comme si tout pouvait s'acheter… Y compris la sympathie d'une prodovnik à l’air sévère. On joue ensuite la carte "yeux de cocker", espérant lui faire pitié : «Mais on ne peut pas pédaler avec cette chaleur, vous comprenez ?!» Échec cuisant. Pendant ce temps, l'heure tourne. 
Elle joue la montre : on est battu, je m'y résigne. 

Mauvais perdant, Bruno tente le tout pour le tout et se met en colère. Il hausse le ton et rapproche dangereusement son visage de l'autorité en question. Je le vois même sauter de force à l'intérieur du wagon quelques secondes avant le départ.

«Tu vas voir si je ne peux pas monter dans ton train !!» … Aie !!

Je vais quand même pas rester plantée là, toute seule, sur ce quai avec tout ce barda pendant qu’il part poursuivre les vacances en Ouzbékistan !! On pourra même pas se téléphoner, on n’a qu’un portable pour deux !!

Ouf ! Pour mon plus grand soulagement, il se fait jeter sur le quai à temps, les portes se referment, un coup de sifflet et le train démarre. 
Parfois on perd… C'est la vie !

Reste à trouver une solution mais pour le moment, nous sommes un peu décontenancés. 

Tous les trains qui passent la frontière sont-ils identiques ? Quand passera le suivant ? Y aura-il de la place pour nous ? Peut-on se faire rembourser nos billets ? …Et dire qu'on s’est levé à 4h du matin pour en arriver là…

Je tente de parlementer avec une caissière complètement hermétique assise derrière le guichet. Un seul mot à la bouche "nieto" ! Pas gagné cette histoire ! Désespérant… 

La suite est complètement surréaliste . Un couple de personnes un peu âgées (disons des gens un peu plus âgés que Bruno !) avec qui nous avions échangé quelques minutes avant l’entrée en gare de notre futur ex train vole à notre rescousse. 

En quelques mots accompagnés de quelques mimes, ils nous expliquent que l'on va prendre un taxi jusqu'à la frontière Ouzbek (environ 150km) puis que l’on roulera en vélo ensuite jusqu'à Tachkent, ville relativement proche. Un taxi ? Avec les vélos ?? Ils sont fous !!! Et puis un taxi se doit être hors de prix…

Oui, ils sont fous. Complètement fous de gentillesse et de bienveillance pour nous. 

Sans que l’on ait le temps de nous préoccuper de quoi que ce soit, un taxi est commandé et une collecte est organisée. 

Oui, oui, vous avez bien entendu : une collecte d'argent sur le quai. Comprenez par là que la dame et le monsieur en question s’approchent de chaque personne et de chaque attroupement sur le quai pour exposer notre situation. En moins de dix minutes, les billets circulent de main en main, les téléphones se rapprochent et des transferts d'argent, via une application, ont lieu. On ne sait combien de personnes ont-ils réussi à rallier à notre cause, tant tout se passe en un clin d’œil, avec discrétion.

Mais que font-ils ?? Impossible de les stopper dans cet élan de générosité, le budget est bouclé. Le taxi est là, il nous attend.

On nous propose même de nous acheter de quoi boire pour le voyage, on décline évidemment. Il ne manquerait plus que ça !

C’est toute un petite troupe qui nous accompagne à la sortie de la gare. Je n'ai déjà plus mon vélo en main, un jeune se charge de le conduire jusque sur le trottoir. Effectivement une voiture est là, coffre ouvert. Je ne peux m’empêcher de sourire quand je repense à la tête de Bruno quand il aperçoit notre futur taxi. Une berline. 

Dans son regard, je lis ça : « Comment voulez-vous qu’on fasse entrer deux vélos dans une voiture pareille ? » Par politesse, il ne dit rien et de toute façon dans cette histoire, nous n’avons rien à dire, juste à nous laisser conduire. 


En quelques secondes, nos vélos sont chargés dans le petit coffre. Empilés l’un sur l'autre, une roue, le guidon et une partie du cadre qui dépassent. Le tout est ficelé, nos sacoches sont empilées sur la banquette arrière et on nous pousse à l’intérieur de la voiture dont le moteur tourne déjà !! C’était quoi déjà notre problème !?!


C’est tout juste si on a le temps de faire une petite photo souvenir avec nos bienfaiteurs du jour, en tout cas avec ceux qui sont là, les nombreux autres étant restés sur le quai pour ne pas rater leur train. 


S’en suit environ 150km parcourus à 150km/h. Quand on sait que pour l’équivalent ou presque de la même distance, le voyage en train aurait duré 4h, c’est à se demander pourquoi on n’a pas penser plus tôt à demander à un chauffeur de taxi équipé d’une Renault Mégane de nous faire traverser le Kazakhstan en un éclair !!

Notre sympathique chauffeur nous déposera juste devant la douane Ouzbek, si la voiture était au calibre du portique de sécurité sûr qu’il nous aurait même conduit plus loin encore ! On veut lui offrir à manger et aussi nos derniers "tinges", la monnaie locale qu’il va nous falloir échanger à présent contre des "sums ousbek". Il décline fermement.

Une grosse heure plus tard, nous sommes arrivés à destination, Tachkent. On n’y croit toujours pas ! On est tellement en avance qu’on émet même l’idée d’aller attendre notre prodovnik préférée sur le quai car notre train va bientôt entrer en gare, après tout, on a nos billets ! La revanche, imaginez sa tête !

Parfois on perd, parfois on gagne et parfois on hallucine complet ! 

Happy end au Kazakhstan !

Casse-tête Kazaque •Escal'A2roues#26•



Le Kazakhstan c'est géant : neuvième plus grand pays au monde.

Logiquement, l'heure n'est pas la même dans tout le pays. Après tout, on pourrait vivre au rythme du soleil et simplement adopter l'heure locale mais l'affaire se complique lorsque l'on veut prendre un train et surtout être à l'heure sur le quai !


+1h, -2h, +30 minutes, heure de la capitale Noursultan en référence, heure locale du point de départ ou heure locale du point d'arrivée ?
On n'a pas tout saisi.

Comprendre les horaires sur un billet de train n'est pas chose aisée... D'autant plus, qu'il faut non seulement comprendre l'heure du départ du train mais aussi l'horaire auquel il faut être sur le quai (jusqu'à 1h30 avant parfois !) pour charger les bagages et s'installer.

Détail de taille quand on a 2 velos et 12 bagages... bien entendu, ces informations doivent apparaître sur le billet ou sur les panneaux d'affichage mais là encore, pour nous, c'est du chinois !

Comprendre les tarifs est encore une autre histoire...

Les horaires... un vrai casse-tête Kazaque !



Pourtant, ici, tout le monde semble s'y retrouver. On a donc imaginé les petits Kazaques s'exercer à de tels problèmes et ce, dès l'école maternelle.


Énoncé du problème :

Bruno et Lara, deux petits touristes accompagnés de leurs vélos traversent le Kazakhstan en train.


Ils embarquent tout d'abord à Aktau à 09h05, heure locale, le 14 juillet pour arriver à Beyneu après 9h de voyage et 464 km parcourus.
Ils voyagent en couchette 2ème classe sur ce trajet.


Ils repartent 24h et 30min plus tard pour rejoindre Aralsk et parcourent ainsi 852 km supplémentaires en 13h27.

Pour ce trajet pour lequel ils n'ont pas de billet, ils se partagent une couchette en 3ème classe en versant un bakchich au prodovnik, le chef de wagon.


Ils repartent ensuite d'Aralsk à 6h27, heure locale, soit 22h18 après y être arrivés pour rejoindre Turkistan en 14h36 de train. Ils disposent d'une couchette en 2ème classe chacun pour ce voyage de 742 km. En arrivant, ils doivent enlever une heure à leur montre pour se mettre à l'heure locale.



Ils quittent ensuite Turkistan le lendemain à 15h59 pour rejoindre Chimkent en 3h52 de train dans une couchette 3ème classe. 171 km de plus au compteur.
Vous suivez ?!


Enfin, ils tentent de repartir de Chimkent à 5h53 le lendemain matin mais se font refouler et restent sur le quai comme deux couillons (avec les vélos, ça fait 4 !) avec leurs billets à la main...
(Billets non remboursables... mais n'en tenez pas compte pour vous simplifier un peu la tâche !)

La suite est une histoire de fou mais vous verrez ça à votre prochain cours d' "Education civique & savoir vivre". Le titre de la leçon sera "Entraide et solidarité Kazaque".


Sachant qu'Aktau se situe à l'extrême Ouest et que Tachkent se trouve à l'extrême Sud-Est du pays. (Quatre fuseaux horaires officiels mais deux heures différentes officieusement)

Quel jour et à quelle heure, Bruno et Lara arrivent-ils à destination ?

Convertissez votre réponse en heure locale du point de départ, heure locale du point d'arrivée mais aussi en heure de référence du pays.

Combien d'heures de train ont-ils dans les pattes après ce grand voyage ?

Même eux n'en savent rien !

Sachant qu'une couchette en 1ère classe coûte environ 49 Ť/km, qu'une couchette 2ème classe revient à 14,5 Ť/km et qu'une couchette en 3ème classe coûte 7 Ť/km.

Sachant qu'aucun supplément n'est demandé pour les vélos.

Sachant aussi que le montant d'un bakchich se chiffre à la tête du client et dépend de l'humeur du "prodovnik".


Combien leur aura coûté approximativement ce voyage ?

Vous pourrez donner votre réponse encadrée dans une fourchette de tarifs possibles, pour le couple, puis par personne. Exprimez ce montant en tenge (Ť), en euros (€) et en dollars ($).

N'oubliez pas de rédiger des phrases pour donner chacune de vos réponses.

Bon courage et bon voyage !

(Souvenir de Géorgie)

Ps: Notez (qu'exceptionnellement !) cet exercice scolaire, vous sera très probablement utile dans votre vie future et qu'il ne sera pas simple de réfléchir à toutes ces questions quand votre cerveau sera tout ramolli alors que la température atteindra 48 degrés à l'ombre en plein mois de juillet !

Alors ? A vous de jouer !