mardi 30 avril 2019

Le voir pour le croire...


Dans la vie, on dit parfois qu’il faut "le voir pour le croire" et s'il y a bien une expression qui prend tout son sens lorsqu’on veut décrire l’ambiance qui règne dans ces fjords Patagons, c’est bien celle-ci. 




Comment imaginer qu’il existe encore quelques régions sur la planète où la nature ait conservé son état originel. Les canaux de Patagonie font partie de ces rares endroits sur terre restés vierges sans que l’homme n’y ait laissé son empreinte et n’y ait réussi à s’y faire une place véritable. 




La végétation y est si luxuriante qu’elle interdit toute progression par voie terrestre, les côtes y sont si abruptes qu’elles défendent le moindre petit bout de terre à qui voudrait y accoster, le ciel y est si bas et si sombre qu'on a toujours l'impression que la nuit est sur le point de tomber. Quant au climat, il y est tellement hostile et le taux d’humidité y est si élevé que tout être vivant autre qu’amphibien aurait bien du mal à s’y sentir à son aise !




Côtes déchiquetées, fjords et bras de mer interminables, vents violents, vagues, marées, taux d'humidité démentiel, pluies multiquotidiennes, côtes inaccostables, forêts primaires impénétrables, épineux, tourbières, herbes hautes, mousses mouvantes… et une magnifique île de marbre incroyablement sculptée par l’érosion que l’on n’atteindra jamais… « Madre de dios », comme c’est loin ! 









Difficile de supporter de telles conditions naturelles quand on n’est pas une otarie, me direz-vous…  Pour autant, trois types d’êtres vivants n’ayant pourtant ni nageoires, ni ouïes, semblent avoir quelques prédispositions et peuvent se vanter de réussir à tirer leur épingle dans ce jeu aquatique.





Il y a tout d’abord de rustiques pêcheurs chiliens qui affrontent la solitude et la rudesse des canaux pour gagner quelques pesos. Ces loups de mers les sillonnent, principalement l’hiver, quand la météo est la plus clémente, en quête de délicieuses « centollas » (araignées de mer) ou de gigantesques moules qui auraient par chance échappé à la « marea roja »… 



Il y a ensuite les locaux de l’étape. Et pour vivre ici, il faut sans aucun doute être un peu « loco » ou alors être « Kawesqar ». Les Kawesqars ou Alacalufes sont des indiens nomades de la mer qui vécurent entre le Golfe de Penas et le Détroit de Magellan,  des siècles durant, jusqu’à voir leur population être peu à peu décimée. Aujourd’hui, les derniers représentants de l’ethnie se comptent sur les doigts d’une seule main. Comment imaginer que des centaines d’hommes, de femmes et d’enfants aient vécu dans ces fjords patagons, se déplaçant dans des barques de bois, s’abritant sous de simples huttes, vivant à moitié nus et se nourrissant quasi exclusivement de moules ? Comment vivre dans l'humidité permanente, sans pouvoir se déplacer librement à terre à cause d’une végétation trop dense et en étant soumis aux aléas météo et maritimes ? L’histoire de ce peuple est tout simplement hallucinante…



Enfin, il y a celui qui n’est ni pêcheur chilien ni Kawesqar. Le seul qui ne soit pas effrayé à l’idée de venir passer ses vacances sous la pluie, qui n’ait pas peur de camper deux mois dans la forêt vierge dégoulinante et de dormir dans un duvet humide, celui qui passe ses journées dans la boue et dans le noir et qui une fois sorti retrouve avec plaisir la pluie et le ciel tout gris… 





Qui serait décidé à venir passer ses congés de Noël chaque année depuis 20 ans dans cet enfer humide ? Personne d’autre qu’un spéléo… En effet, depuis des années, la joyeuse bande de « Centre terre » empilent les expés et les découvertes sur les îles de marbre de Diego de Almagro et de Madre de Dios.


Pêcheurs, Kawesqars, spéléos… Et nous dans tout ça ? Dans quelle catégorie jouons-nous ? Sommes nous rien de tout ça ou bien un peu tout cela à la fois ??






Embarqués sur nos bateaux comme des pêcheurs, accoutrés comme des spéléos et à la recherche d’un petit bout de plage où se dégourdir les jambes comme des Kawesqars…


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