dimanche 9 juin 2013

"La Montaña más bella del Mundo"




Bien sûr, nous avions plein d'idées...

Des sommets, il y en a partout ici, tous plus beaux les eux que les autres... Pourtant il faut choisir!
Nos virées au Pisco et à l'Esfinge nous ont appris à nous méfier des approches en mode "à pieds" et "sans mules"... Nous n'avons ni le budget, ni la logistique d'une expé, ni vraiment les objectifs, quoique... voir tous ces sommets enneigés c'est vraiment tentant!
Nous choisissons donc d'aller visiter la vallée de Santa Cruz où se trouvent plusieurs sommets accessibles...

L'idée est de passer plusieurs jours dans cette vallée et de faire de celle ci notre "camp de base". Pour cela, nous choisissons de nous faire aider par des mules pour transporter du matériel et surtout de la nourriture pour être autonome plusieurs jours (12 jours au total), nous évitons comme ça les aller-retours à Huaraz, les taxis et bus, nous ne paierons les mules et l'ariero (muletier) seulement 3 jours pour avancer un peu dans la vallée, ensuite nous nous débrouillerons...

La météo annoncée n'est pas terrible, mais le temps file et nous somme déjà presque fin mai, alors on fonce!
En montant vers le camp glacier

Notre premier objectif??

Essayer de grimper sur la plus belle montagne du monde... haha rien que ça!... (oui oui je vous vois déjà sourire!) C'est pourtant comme ça qu'a été caractérisé l'Alpamayo lors d'une exposition photos à Munich en 1966 et c'est un peu la réputation que "se traine" ce sommet depuis...Bref! C'est peut être pas la plus belle des montagnes mais c'est quand même un sommet qui a la classe! Nous choisissons de parcourir sa célèbre face ouest et d'emprunter la "directe française", la voie consiste à atteindre le sommet directement en passant entre les deux ice-flutes principales.


Quelques jours auparavant, deux guides péruviens ont trouvés la mort sur l'Alpamayo dans cette même voie alors qu'ils équipaient de cordes fixes la première moitié de la face pour leurs 8 clients qui devaient effectuer l'ascension la nuit suivante et le lendemain... Il était 17h et un gros bloc de glace se serait détaché du haut de la face entraînant une avalanche, les deux guides ont été emportés  alors qu'ils étaient en train de redescendre et se trouvaient au niveau de la rimaye... Seul un des deux corps a été retrouvé depuis... A Huaraz, c'est un peu la psychose qui s'est installée, on entend un peu de tout... Alpamayo fermé, Alpamayo interdit, Alpamayo dangereux...  

C'est compréhensible mais on sait aussi comme souvent que les gens ne sont peut être pas très objectifs... On verra bien, nous avons déjà 3 jours de marche avant d'atteindre le pied de la face, le temps que nous arrivons la polémique se sera surement calmée...


Entre le camp de base et le camp glacier

Nous prenons donc la direction de Caraz puis de Cashapampa où nous retrouvons notre arriero Alex et ses deux montures: une mule blanche, un joli âne gris. Après un passage par le poste de contrôle du parc national du Huascaran où il faut encore batailler pour pouvoir passer, on se refait encore une fois dire que la montagne est "peligrosa", on nous conseille même de faire une prière à la Pachamama... Finalement on passe!
Durant 2 jours, nous allons emprunter l'itinéraire du très fréquenté trek de Santa Cruz en remontant cette longue et belle vallée bien plate avant de bifurquer à gauche vers le camp de base de l'Alpamayo... Nous nous séparons des mules, c'était pourtant sympa de marcher "légers"! 
Retour à la réalité dès le lendemain pour la montée du camp de base au camp glacier, 1200m de dénivelé chargés comme des ânes! 600m de moraine et 600m sur le glacier pour passer le col entre l'Alpamayo et le Quitaraju à 5550m et installer le camp juste derrière au pied de la face.... Il fait chaud, c'est lourd, c'est raide à la fin et on galère bien comme il faut!

Une fois le col passé, la face ouest de l'Alpamayo s'offre enfin à nous, magnifique! Nous apercevons les restes de l'avalanche au pied de la paroi, les recherches continuent toujours, une équipe de 7 guides et porteurs péruviens sondent depuis presque une semaine la zone de l'accident...

Au camp glacier
Nous pensons alors nous orienter sur le sommet voisin du Quitaraju, mais les guides effectuant les recherches ne semblent voir aucun inconvénient à ce que nous partions dans la "directe française", l'itinéraire est "propre", pas de bloc menaçant... La voie n'a pas été refaite depuis et le matériel fixé avant l'accident est encore en place. Si nous décidons d'y aller, ils nous demandent d'essayer de le récupérer.

Le réveil sonne donc à minuit la nuit suivante, il ne fait pas très beau. Après avoir contourné la grosse crevasse au pied de la face, nous passons à côté des tas de neige remués à la pelle par les secouristes les jours précédents, les sondes sont encore là plantées... Dès que le jour sera levé les recherches reprendront... Ambiance glauque au rendez vous, penser qu'il y a surement quelqu'un enseveli là, juste sous mes pieds me serre l'estomac...
Le jour se lève...
Nous passons la rimaye par un passage raide en neige pas très consistante puis nous poursuivons et trouvons assez rapidement de la glace après quelques longueurs en neige. C'est parti pour des centaines de mètres de pentes de glace, c'est un peu répétitif mais agréable, les conditions sont plutôt bonnes... Par contre nous sommes toujours dans d'épais nuages et cela ne semble pas vouloir se dégager... Nous ne voyons pas à 50m et nous n'avons pas trop de repères... 










Dans les dernières longueurs

On enchaîne les longueurs, les relais sur broches sont bons. Finalement sans trop s'y attendre on débouche au sommet à 5947m, la vue est imprenable! ...jour blanc...  Dommage mais on est contents quand même!



Cumbre !
Sans traîner  nous attaquons la descente, le topo dit 7 rappels de 60m dans la voie, nous n'avons que des cordes de 50m, nous en ferons  presque une dizaine. 
Nous abandonnons un pieu à neige au sommet pour notre premier rappel puis la suite déroule sur abalakovs puis à nouveau sur pieu... Il doit commencer à neiger au dessus ou à y avoir du vent car nous commençons à recevoir des bons sprindrifs... Vers le bas de la face, ça coule de plus en plus et ça s'épaissit... Il ne fait pas bon traîner ici, et on dégage le plus vite possible...

Retour au bivouac ... fatigués !
Pendant la descente, nous récupérons au passage le matériel abandonné pour le ramener au camp: au moins 5 cordes, des mousquetons, des broches, des pieux  (dont un littéralement plié sous le choc...)...
Cette manière de progresser à l'aide de cordes fixes (fractionnées tous les 60m) dans ce genre de terrain, et le fait d'évoluer à aussi nombreux  que ce qui était prévu pour le groupe au moment de l'accident (2 guides pour 8 clients) nous laisse quand même septique, le couloir emprunté par la voie canalise tous les blocs de glace, petits et gros... Les guides locaux n'ont surement pas d'autre choix que d'accepter ce genre de conditions de travail pour pouvoir manger, les contraignant à se trouver au moment le plus chaud de la journée à des endroits où il est judicieux de passer habituellement aux heures les plus fraîches pour fixer des cordes pour leurs clients, ces derniers étant trop nombreux pour être encordés... Si les guides locaux n'ont probablement pas trop le choix d'accepter ou non ce genre de boulot, c'est à se demander si les agences n'ont pas les moyens de freiner ce genre de dérives à moins que ce ne soit les touristes eux mêmes qui puissent y remédier en acceptant de payer surement un peu plus cher mais de garantir un peu plus leur propre sécurité et celle de leur guide en constituant des groupes moins nombreux...

Pour notre part, nous avons eu la chance d'être les seuls à parcourir la voie ce jour là. Les jours suivants, ça pose pas mal de neige et différentes cordées buteront, alors même si nous avons été dans les nuages toute la voie et même si nous n'avons rien vu au sommet, nous avons quand même eu le créneau:
On a grimpé la plus belle montagne du monde!! :)






2 commentaires:

  1. Bonjour Lara,

    On ne se connait pas mais on a des connaissances communes (je suis au CAF Toulouse). Bref, je voulais juste te dire merci pour ces nouvelles fraiches et ces photos de la cordillère blanche. Avec mon ami, nous partons dans quelques jours, et même si notre programme est moins ambitieux que le votre, ça fait plaisir et rêver de lire des news de là-bas en attendant le départ.
    Bonne fin de séjour.

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  2. Salut à vous deux.
    Merci pour toutes ces photos à couper le souffle.
    Magnifique!
    Bon courage pour la suite...
    Franck Carry

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