dimanche 24 juillet 2022

Premiers tours de pédales en Asie Centrale •Escal'A2roues#25•

Il est 6h quand nous sortons de l'aéroport d'Aktau où nous avons atteri quelques heures plus tôt et à l'intérieur duquel nous venons de prolonger, tant bien que mal, notre nuit, à même le carrelage.

La journée ne fait que commencer et le mercure du thermomètre semble déjà atteindre des sommets. Bien que le soleil soit encore relativement bas, la luminosité a déjà cet aspect bien particulier : tout brûle les yeux.
Un bâtiment perdu au beau milieu de la pampa, une route qui y arrive, une autre qui en repart, rien d'autre à l'horizon.



Pour "uniques" bagages, deux sacs à dos et deux grands cartons plats dans lesquels, nous avons réussi, comme par enchantement, à faire entrer vélos et nombreuses sacoches quelques heures plus tôt.

Il aura fallu jouer fin pour parvenir à tout démonter, à tout empiler, à tout emboîter, à tout faire entrer et à tout ficeler à grands coups de scotch. Pourtant l'hôtesse de la compagnie aériennne avec laquelle nous voyageons n'a pas été du même avis. Deux kilos de trop sur l'un des deux cartons et c'est le caprice ! "Nieto de chez nieto !"
Il nous aura alors fallu réouvrir, réorganiser, refermer et rescotcher la valise de papier géante. Dommage quand on sait que le second carton a lui, deux kilos de marge et que l'avion décolle dans moins de 30 minutes.

A l'instant présent, c'est le scénario inverse qui nous attend. Comment appelle-t-on une partie de "Tetris" à l'envers ? Un "chamboule-tout" ? Un puzzle ?
Nous remettons une à une, bout à bout, les pièces de ce grand jeu sous les regards quelque peu interrogatifs des autochtones.
Quelques heures plus tard, les vélos ont repris leurs allures habituelles : un guidon, un cadre, deux roues, une selle.  Chaque chose a retrouvé sa place dans une sacoche. On a plus que triplé de volume en quelques minutes à peine et nous sommes prêts à pédaler vers de nouveaux horizons !


Une bonne vingtaine de kilomètres, c'est la distance à parcourir pour rejoindre la ville la plus proche et c'est tout ce qu'il nous faut pour prendre la mesure de là où nous venons de mettre les pieds. Une micro traversée initiatique du désert en plein mois de juillet : le Kazakhstan en plein été, quelle bonne idée !


Vingt-trois kilomètres, vent dans le nez, quarante-cinq degrés passés, c'est juste assez pour avoir déjà trop chaud, pour avoir très soif et faire l'expérience de nos premiers mirages !

Quelques véhicules et quelques troupeaux de chameaux seront nos seules distractions sur le trajet. Sable et minuscules buissons d'épineux à perte de vue. Bienvenue dans le désert !


Les premiers immeubles finissent pourtant par apparaître au loin, complètement flous, complètement fous, semblant flotter tels des flammes au dessus de ce sol brûlant. Nos bouches sont tellement sèches que nous peinons à parler lorsqu'il s'agit de demander un peu d'eau à une voiture que l'on a arrêtée en chemin.

Après une course effrénée contre le vent, on finit par rattraper ces bâtiments qui reculent pourtant sans cesse. Plus une goutte d'eau dans nos gourdes, températures corporelles à point, nos peaux sont grillées comme celle d'un poulet et salées comme des harengs.
On se regarde et nos yeux disent tout : "ça promet !"

Aktau, des immeubles neufs sans cachet, alignés comme plantés en rang d'oignons. Cette entrée d'agglomération semble être sortie du sol si récemment.
Quelques kilomètres plus loin, le vieux style soviétique reprend le dessus.

Les voitures de toutes générations ne s'écartent guère à notre hauteur et nous obligent à parfois squatter un peu les trottoirs, les coups de klaxon sont une nouvelle fois monnaie courante.
La proximité de la mer Caspienne de l'autre côté de la ville tarde à se faire sentir, pas de fraîcheur notable ni d'air marin à déclarer...
Même un saut à la plage et un bain quelques heures plus tard, nous rafraichira à peine !



Les devantures des magasins ne laissent transparaître aucun indice, si ce n'est quelques enseignes composées d'un enchaînement de lettres, de mots en sylirique auxquels nous ne comprenons évidement rien.
C'est ainsi que, quand on pense entrer dans une banque, c'est dans un magasin de vêtements qu'on atteri ! Faute de pouvoir retirer nos premiers "tenges" à un distributeur, c'est avec deux verres d'eau offerts à la main qu'on finit. L'image est belle, c'est bien ça l'essentiel !
Avec cette chaleur étouffante, la solidarité est de mise, l'humain est tout simplement en mode survie.

Pas de pitié pour le moindre rayon de soleil, qu'il reste dehors !
Vitres teintées, portes en métal, rideaux hermétiques aux fenêtres, tout est bien colmaté.

Ces allures de commerces fermés, combinées au fait que les gens évitent naturellement de sortir aux heures les plus chaudes de la journée ou longent méthodiquement les murs ombragés donnent une impression de ville vide, désertée. Pourtant derrière chaque porte, il y a de la vie et de l'air climatisé, il suffit d'oser la pousser.

Chaque lieu habité est comme une oasis dans ce désert de sable.


Les yeux se brident et les visages sourient, les peaux se tendent et sont plus mates, les voiles et les robes fleuries apparaissent, les hommes sont parfois coiffés de casquettes en feutre.


La curiosité envers les cyclistes européens que nous sommes grandit considérablement.
Pas de doute, ce coup-ci nous avons véritablement changé de continent.

Ce matin là, nous venons de donner nos premiers tours de pédales en Asie Centrale.


En à peine quelques heures, quelques kilomètres, quelques expériences et nous aurons compris que vouloir pédaler dans le désert au mois de juillet, ce n'est pas gagné !

On pourrait évaluer ainsi notre faible autonomie :

- entre deux zones ombragées : 20 minutes
- entre deux endroits climatisés : 2 heures
- entre deux douches : 12 heures
- entre deux siestes : 6 heures
- entre deux gorgées d'eau : 15 minutes
- entre deux gorgées d'eau fraîche : 3 heures
- entre deux cornets de glace : 4 heures


Aussi, si nous ne voulons pas mourir lyophilisés et réussir à rejoindre des contrées plus montagneuses avant la fin de l'été, il va nous falloir optimiser cette traversée estivale du Kazakhstan.

Le réseau ferroviaire offre cette opportunité à merveille mais encore faut-il en comprendre les horaires mais ça, c'est une autre histoire que nous vous raconterons plus tard !

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