lundi 8 janvier 2024

Escale en Tassie.....Escal'A2roues#142



S'il est un lieu où l'on perd ses repères, en matière d'escalade, c'est bien sur la péninsule de Tasmanie. Située au sud d'Hobart, c'est le point le plus méridional de l'Australie, le plus proche de l'Antarctique. Que de similitudes comportementales entre un pingouin et nous-mêmes, à la vue de ses intimidantes formations rocheuses


L'endroit est sauvage, isolé, et notre première journée de grimpe nous demande 13h vélo/vélo... L'approche même, si elle est longue, est particulièrement roulante. J'entends par là un chemin large, bien tracé, jamais de pentes excessives, avec de très belles marches en pierre de taille, et parfois du textile qui apparaît sous le gravier. Tient, ni les pierres ni le gravier ne semblent provenir des alentours !Nous sommes dans un parc naturel, le camping sauvage est formellement prohibé. Ces caps de bout du monde peuvent "heureusement" être survolés en hélico, ou approchés en bateau surmotorisé...

Ces moyens n'élucideraient-ils pas l'aspect non endémique de ces pierres, de ces tonnes de gravier et de ces kilomètrages de textile pour stabiliser les chemins? Le comble était atteint lorsqu'on s'est retrouvé face à un panneau interdisant le parcours d'un sentier dans un certain sens. Après un rapide coup d'œil sur la belle carte adjacente et quelques explications, on comptend qu'un itinéraire de 4 jours de "refuge en refuge" en sens unique est organisé par une boîte privée, avec une dépose en bateau. Rien d'autre que de la privatisation à l'intérieur d'un parc. Grrr..

Heureusement, nos objectifs sont autres.Ces caps aux origines volcaniques, ont laissé en équilibre quelques "doigts" dominant l'océan. La dolorite, roche qui les constitue, est généralement de très bonne qualité: dure et extrêmement adhérante. Bien nous en a pris, de nous acoutumer au style par quelques centaines de mètres d'escalade les jours précédents. Le caractère " hauturier" des ascensions exacerbe l'ambiance. Les voies, atteintes souvent en rappel, démarrent au ras de l'eau. La houle, formée loin dans l'océan Indien, vient claquer dans des porches avec une rumeur constante. Le courant généré par ces mouvements agite des algues de plusieurs dizaines de mètres et s'ajoute à çà, l'imaginaire de la profondeur de ses abysses qui prolonge la paroi sur laquelle nous nous agrippons ! De profonds cris guturaux d'une colonie de phoques, l'odeur, et les "splash" des baleines qui s'ébattent non loin, vous y êtes !

On met le cap vers Totem Pole, seulement 65 mètres d'escalade mais dans notre niveau max, où il faut, en plus, se protéger par ses propres moyens sur certaines portions.


Après une heure et demie de marche, il est là, en contrebas, coincé dans une étroite gorge. Ça commence par : accrocher une corde en fixe, se laisser glisser dessus et penduler au-dessus des flots tout blancs d'écume pour rejoindre sa base. Après quelques essais infructueux, je parviens grâce à un précis crochetage en monodoigt dans une des plaquettes du relais à établir ce dernier.


Lara me rejoint, en prenant soin de ne pas laisser échapper la corde, qui par une simple mais efficace manœuvre nous permettra de rejoindre la terre ferme. Grimper ensuite jusqu'à la terrasse médiane, un 24 bien salé, entendez par là un peu glissant... Il faut commencer par aller poser, à bout de bras, un friend dans une inversée, sous peine de se retrouver tout arnaché dans le jacuzzi. L'étroitesse du lieu accélère la brise, et un bon effet venturi soulève des embruns. Une superbe terrasse nous accueille à mi-hauteur. Vite, le soleil va se carapater ! La suite est encore plus ardue ; les astuces accumulées ces dernières décennies sortent du chapeau.


On ne pourra pas revendiquer une escalade "by fair means", mais l'intention y était. Nous nous retrouvons bien émus sur la terrasse sommitale. La boule que j'avais au ventre m'a quitté.



Reste six bons mètres à remonter par une belle fissure vierge de tout équipement et quelle n'est pas ma surprise d'arriver sur le sommet, lui aussi exempt de tout amarrage.


Moment tant attendu, mettre en place la fameuse tyrolienne. Gaffe à ne pas trop tirer, sous peine de faire basculer le fragile édifice !!! Je pars sur un brin, contre-assuré, on ne sait jamais, par notre bonne vieille corde. .


Je double la corde pour Lara, façon rappel horizontal.


En pleine mer, c'est le festival, les baleines sont aussi excitées que nous, et le manifestent par des sauts des plus audacieux.


Oserai-je un c'est "la baleine sur le totem" au risque de le faire s'écrouler à jamais... ?!

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