mardi 20 août 2024

Expé à Tres Picos...!Escal'A2roues#197



I. L'approche

Entre Teresópolis et Tres Picos, il y a une route qui fait peur. Une voie étroite et des camions qui vous frôlent, des hautes herbes qui empiètent sur la route et pas mal de trafic. Bref, rien de bon pour un cycliste.

On a donc opté pour le chemin des écoliers : des pistes de terre qui montent et descendent sans cesse suivies d'un sentier si raide qu'il a fallu décharger les vélos, les pousser à vide et faire quelques portages de sorte que la scène se mit à ressemblait davantage à une randonnée à pied ou plus exactement à un déménagement écolo sans moyen motorisé qu'à une simple balade à vélo. Après pas mal de dénivelés avalés et quelques litres de sueur perdus, les belles parois se multiplièrent au-dessus de nos têtes !

Nous étions arrivés à destination !


Salinas est LE spot brésilien historique, un nom connu des grimpeurs de tout le continent sud américain. Et pour passer les frontières d'un si grand pays, c'est que l'intérêt grimpestre est tout aussi grand.

Le Pico Maior mérite à lui seul le détour : une paroi haute de sept cents et quelques mètres, ce n'est pas tous les jours qu'un tel morceau se présente !


II. Au pied du mur...

Ce qui est "drôle", c'est qu'à chaque fois que l'on a dit aux grimpeurs de Rio que l'on envisageait d'aller grimper à Tres Picos, ils nous disaient, tous sans exception, la même chose : "Tres Picos, c'est magnifique mais ce n'est pas comme ici. Là-bas, les points sont très loin !" Quelle bonne nouvelle !

Et comme à Rio, ce n'était déjà pas toujours les vacances, on avait bien compris que cela ne le deviendrait pas plus à Tres Picos !!

Lorsqu'après quelques jours de vélo en mode VTT version randonnée à pied accompagnés de deux vélos, au détour d'un joli col, le Pico Maior est apparu, nous étions d'autant plus impressionnés.

Nous étions au sens propre comme au figuré, au pied du mur. Il ne restait plus qu'à poser les vélos, cacher les sacoches, sortir le matériel de grimpe et prendre notre courage à quatre mains pour nous lancer dans cette immense face !


III. Une baguette magique nommée "perfo"

En bons petits frenchies, nous optons pour LA voie Française de la paroi. Une voie "très équipée" du point de vue de Sergio Tartari, principal grimpeur et équipeur local, "plutôt engagée" selon Arnaud Petit et "Parois de légende". Il était tentant d'aller voir ça de plus près !

"Décadence avec élégance", c'est 680 mètres de grimpe, des cotations autour du 7a+ max, des dalles et du mur vertical pour accéder au sommet du Pico Maior. Cette ligne ouverte par une bande de français, Manu Ratouis, Bruno Martel et Jean Claude Razel en 1998, a aussi la particularité d'avoir amené à Tres Picos, un élément nouveau : le perfo. Le perfo dans le domaine de l'équipement en escalade, c'est un peu comme le mariage : "pour le meilleur et pour le pire".


Jusque là, ici au Brésil, c'est au tamponnoir qu'on perçait le trou pour placer un "grampo", le gros piton à compression local. Un rocher dur, un effort fatiguant dans des positions probablement souvent inconfortables ! Autant dire qu'il devait souvent être plus judicieux de poursuivre sa fuite vers le haut que de faire du surplace et s'exténuer à donner de grands coups de marteau !

Alors les p'tits français et leur outil magique allaient-ils révolutionner la grimpe brésilienne ?

Le son du marteau sur le tamponnoir allait-il être désormais remplacé par des bruits de perceuse ? L'éthique allait-elle prendre un nouveau visage ? La grimpe allait-elle changer radicalement de caractère ?

Force est de constater, après plus d'un mois de grimpe et de vagabondages verticaux au Brésil, que nous sommes la majeure partie du temps, bien loin des standards européens en terme d'engagement. Alors oui, "Décadence avec élégance" est un poil plus équipée que la moyenne et ce sont des spits et goujons que l'on clippe et pas de simples pitons à compression mais que les puristes se rassurent également : l'espacement des points dissuadent quand même grandement le grimpeur d'une éventuelle chute, et puis les plaquettes ont vraiment, depuis tout ce temps, bien rouillées !!


IV. De l'océan granitique à l'océan végétal...

S'il y a bien UN avantage à ces foutues parois dalleuses, c'est qu'on peut enchaîner les rappels sans craindre de coincer la corde ! En même temps, ça tombe plutôt bien parce que, déjà que quand il y a quelques points, ça fout bien la trouille. Alors s''il fallait regrimper dans ces dalles lisses en suivant la ligne de rappels sans aucune protection à l'horizon, moi, je meurs littéralement sur place !

Bref, on descend en toute tranquillité ou presque !

Seule ombre au décor et pas des moindres.. ici, parfois la coutume est de faire relais sur un seul et unique point,  donc sur un pauvre "grampo". Ce piton à compression local à la tige pas bien longue et entrée en force dans le rocher, rien de plus ! Pas de colle, pas de système d'expansion mais des générations et des générations de grimpeurs brésiliens qui ont testé leurs résistances pour nous !


Les approches brésiliennes ou l'art du bartassage illustrés dans une petite vidéo ci-dessous...

(Rien d'exceptionnel dans ces images, nous ne sommes ni perdus, ni en train d'ouvrir un nouvel itinéraire mais juste en train de tenter de suivre un véritable sentier de grimpeur !)

Les brésiliens, ce sont des as en dalles, en cheminées mais ils ne sont pas les rois de la machette !


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